Accepter Ajuster Adapter pour construire sa maternité revée
- Dorlie Kabieni
- 20 mai
- 7 min de lecture
Aujourd’hui, je parlais avec ma personne ressource – vous la connaissez sans doute, Audrey – de la façon dont j’aurais aimé vivre ma maternité. Pendant que je me déchargeais de ce besoin si fort et si intense de vivre cette maternité rêvée, je lui ai confié toutes mes frustrations, mes besoins. Elle m’a répondu :
« Je constate que nous sommes nombreuses, en tant que mamans, à avoir envie d’une certaine maternité. Cela nous semble simple à mettre en place, mais finalement, on se retrouve avec des regrets, des remords, de la culpabilité… Parce que notre entourage ne nous a pas permis de réaliser cette maternité rêvée. »
J’ai trouvé ses mots puissants et réconfortants. Puis elle a ajouté :
« J’entends tout ce que tu me dis. Ce qui est difficile aujourd’hui, dans ton parcours, c’est que tu ne peux qu’envisager la suite. Il n’y aura pas de changement immédiat, ni aujourd’hui ni demain. Mais ce qui est beau, c’est que justement tu peux envisager cette suite, et redresser la barre sur ce qui te laisse des remords et de la culpabilité. »
C’est à ce moment que j’ai compris que le vrai problème, c’est que je n’avais jamais écrit ma maternité rêvée. Parce qu’on pense souvent qu’on ne peut se projeter qu’une fois que le bébé est là. Pourtant, écrire permet d’ajuster. Et au fond, on sait ce qu’on veut, car cela vient aussi de ce qu’on a connu.
Moi, je viens d’une culture où les bébés sont portés tout le temps. Cela n’empêche ni la motricité ni l’autonomie : au contraire, plus un bébé est rassasié affectivement, plus il est indépendant. C’est ce que j’ai vu, ce que les femmes autour de moi ont fait. Chez nous, le bébé dort avec ses parents jusqu’à un an, parfois en cododo, parfois dans le lit, de façon sécurisée. Puis à un an, on lui explique qu’il passera dans la chambre d’à côté. Ce n’est pas discutable. Il boude un peu, mais il comprend que dans la vie, il y a un temps pour tout.
C’est comme cela qu’on procédait dans ma culture. Et moi, j’avais besoin de cela : sentir mon enfant sur ma poitrine, écouter sa petite respiration collée à la mienne, chanter à l’unisson la musique de l’amour – comme un hymne de celui de Dion – savoir qu’il ou elle est mien·ne, que nous ne faisons qu’un.
J’avais envie d’allaiter jusqu’à un an, de couver mon petit. Mais est-ce que ces souhaits étaient compatibles avec mon travail ? Est-ce que cela servirait ou desservirait mon fils ? Quelle maternité serait adaptée à ma réalité professionnelle ? Écrire ma maternité rêvée m’aurait permis de trouver un équilibre entre ce que je souhaitais et ce qui était possible, et surtout d’être en paix avec ce que j’aurais choisi.
Car dans cette maternité rêvée, il y a aussi mon compagnon, ses valeurs, sa propre représentation de la paternité qu’il souhaite incarner. Il y a la jonction de deux souhaits. Écrire aurait été une manière d’aligner nos désirs, de construire un chemin commun.
Aujourd’hui, en écrivant tout cela, je me rends compte que c’est essentiel de prendre le temps de se poser et de se projeter pour ne pas vivre dans la frustration. Je suis plus sereine : je n’ai pas pu allaiter jusqu’à un an, mais je l’ai fait jusqu’à cinq mois et demi, malgré les contraintes de travail. Et aujourd’hui, dès que je peux, je le porte. Et quand il faut, je le pose, même s’il doit pleurer un peu parfois.
Chères mamans, il y a des choses que j’aurais aimé entendre, des choses que j’aurais voulu faire avant l’arrivée de mon bébé. Prenez le temps de vous poser, de discuter avec votre compagnon, et de convenir ensemble d’une sorte de charte, d’accord sur la façon dont vous souhaitez vivre votre parentalité. Surtout pour les trois premiers mois qui suivent la naissance – des mois cruciaux. Et puis, selon l’enfant que vous aurez, faites des points d’étape pour vous ajuster ensemble.
Aujourd’hui, je sais ce que j’aurais voulu. Mais surtout, je sais ce que je veux pour l’avenir. Que Romaric dorme dans sa chambre, je suis en paix avec ça. J’ai un travail très prenant et, malheureusement, nous sommes isolés de notre famille, sans relais. Et quand il n’y a pas ce village pour vous aider à élever votre enfant, alors oui, il faut adapter ce que l’on souhaite à ce que l’on doit faire, tout en prenant le temps de l’assumer.
Je sais qu’on ne peut pas tout prévoir à l’avance. Moi aussi, je me disais que j’allais faire « au feeling ». Mais avec du recul, j’aurais aimé qu’on m’encourage à écrire ma maternité rêvée, et à en discuter avec mon compagnon. Même des petites choses : allaitement ou biberon (ou les deux ?), cododo ou chambre séparée tout de suite ? Ce sont des détails qui, mis bout à bout, peuvent changer beaucoup de choses.
Il existe des personnes ressources pour vous accompagner dans ce cheminement. La sage-femme et la PMI (Protection Maternelle et Infantile) sont deux soutiens précieux. Cherchez votre PMI de secteur : pour ma part, j’étais complètement perdue sur le mode de garde, et c’est la PMI qui m’a accompagnée, étape par étape. Elle m’a aidée à repérer les crèches, à rédiger les demandes… et parfois même à envoyer des mails à certaines crèches.
Quant à la sage-femme, elle porte bien son nom. C’est une femme sage, censée vous accompagner avec bienveillance. Moi, j’avais déménagé et je ne voulais pas lâcher mon ancienne sage-femme… Résultat : j’ai perdu du temps précieux. La sage-femme libérale (en dehors de l’hôpital) est indispensable. À l’hôpital, les sages-femmes n’ont souvent pas le temps de répondre à toutes vos questions. Mais la sage-femme libérale, elle, le peut. Elle vous aide à construire un projet de naissance, à penser la maternité que vous souhaitez vivre.
Et après l’accouchement, elle peut venir vous voir à domicile – c’est remboursé par la Sécurité sociale. Tirez-en profit : préparez vos questions à l’avance, discutez point par point, ajustez avec elle ce qui doit l’être.
Surtout, écoutez-vous. Faites-vous confiance. Oui, je sais, ce n’est pas toujours simple. La limite est fine entre se faire confiance et prendre en compte tous les conseils qu’on reçoit. Parfois, ces conseils pleuvent de partout. Trop d’infos, trop d’avis, et vous voilà envahie, perturbée, déconnectée… et pleine de doutes.
C’est pour cela qu’il est très important que vous vous sentiez en confiance avec vos interlocuteurs. Si vous sentez que vous n’êtes pas écoutée, que le courant ne passe pas – c’est comme une mauvaise nounou : on le sent tout de suite que ça ne marchera pas, alors pourquoi laisser son bébé quand on n’est pas sereine ? Changez. Changez tout de suite.
C’est une règle que je garde comme mantra :🌀 On essaye. Si ça ne marche pas, on essaie de comprendre pourquoi. On en parle. Et si ça ne marche toujours pas… on change.
Alors, que vous soyez seule ou avec votre compagnon, entourez-vous bien. Soyez alignée avec vous-même. Et si c’est trop difficile, sachez que toutes les maternités disposent d’un·e psychologue. Un ou deux rendez-vous pour faire le point dans sa tête, ça peut vraiment aider.
Prenez ce que vous pouvez prendre. Composez votre propre village, celui qui vous portera, celui qui vous aidera à élever votre petit bébé.
On récapitule : essayez d’écrire votre maternité rêvée. Avec votre compagnon, ou seule si vous traversez cette étape en mère célibataire — comme ma mère l’a été. On en parle avec la sage-femme, à la PMI, et surtout, on n’hésite pas, à chaque étape, à adapter sa maternité au bébé qu’on a et à son propre mode de vie.
Une maman m’a confié un jour qu’elle avait un bébé qui pleurait beaucoup, et que ce n’était pas du tout comme ça qu’elle avait imaginé sa maternité rêvée. Dans ces cas-là, il faut s’entourer tout de suite, avoir des bras pour relayer.
Il existe aujourd’hui des plateformes et réseaux d’entraide entre mamans :
👉 Sur Les Mamans Solidaires, des mères peuvent venir chez vous, apporter à manger ou passer un moment avec vous et bébé.
👉 Ma Bonne Fée propose un accompagnement parental à domicile, parfois pris en charge par certaines mutuelles.
👉 Des groupes locaux sur Facebook (comme “Mamans de [votre ville]”) ou des collectifs féministes comme Parents & Féministes permettent aussi de créer du lien, de se relayer et de se soutenir concrètement.
Oui, je sais… c’est dur de confier son bébé à quelqu’un qu’on ne connaît pas, surtout quand il est si petit. Je comprends, alors si c'est le cas voici ce que je te propose :
On dessine ensemble le cercle des personnes sur qui on peut compter :
Le noyau, c’est le premier cercle : les personnes sûres, fiables.
Le deuxième cercle, ce sont celles sur qui on peut compter, mais qui ne sont pas toujours disponibles.
Le troisième cercle, ce sont les personnes ponctuellement disponibles.
Une fois ce cercle dessiné, on va chercher dans le noyau, et surtout, on n’hésite pas à dire que c’est dur, qu’on a besoin d’un relai. D’une sieste. D’une pause pour aller chez le coiffeur et se sentir bien. D’un moment pour faire ce qui nous fait du bien.
💡 Où trouver de l’aide concrète quand on est jeune maman ?
🫂 Dessinez votre cercle de soutien
Noyau dur : proches fiables, présents physiquement.
Cercle élargi : personnes bienveillantes mais moins disponibles.
Soutien ponctuel : voisines, autres parents, réseaux locaux.
S’entourer dès que possible des personnes sur ce cercle.
N’attendez surtout pas d’être épuisée pour demander de l’aide. Entourez-vous de personnes de confiance (famille, amis, voisin.e.s) et n’hésitez pas à exprimer vos besoins : une sieste, un repas, une sortie, un moment de répit.
🌐 Plateformes d’entraide entre mamans
Les Mamans Solidaires : mamans bénévoles qui aident à domicile, apportent un repas ou gardent bébé pendant une sieste.
Ma Bonne Fée : accompagnement parental à domicile (prise en charge possible par certaines mutuelles).
Parents & Féministes – Relais Parents : réseau d'entraide concrète entre parents.
Groupes Facebook locaux : ex. “Mamans de Paris”, “Mamans de Marseille”, etc.
🧑⚕️ Professionnels à contacter sans hésiter
PMI (Protection maternelle et infantile) : soutien psychologique, pesée du bébé, conseils d’allaitement ou de rythme.
Sage-femme post-partum : elle peut vous accompagner au-delà de l'accouchement, à domicile ou à la maternité.
Psychologue de la maternité : souvent disponible gratuitement sur place ou sur rendez-vous. Elle est là pour parler des émotions, de la fatigue, des doutes, sans jugement.
Prends le temps — ce temps précieux — pour construire ta maternité réelle. Peut-être qu’elle ne sera pas exactement celle que tu avais rêvée, mais cela ne t’empêche pas de rêver encore. Rêver pour créer ta propre maternité, une maternité à toi, une maternité équilibrée pour toi et ta famille.
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